Investir massivement et stratégiquement dans les trains du quotidien
Mobilité : « La France doit investir massivement et stratégiquement dans les trains du quotidien »
Le collectif « #enTrain » qui réunit une quinzaine d’associations appelle dans une tribune au « Monde » publiée le 17 juillet à la mise en place d’un plan d’investissement stratégique ambitieux et transparent qui assure l’entretien et le développement de l’infrastructure ferroviaire au service d’une mobilité sobre, partagée et propre pour toutes et tous.
NOSTERPACA est membre de ce collectif et a contribué à la rédaction de cette tribune.
Tribune. La nécessité de repenser nos modes de vie est pressante face aux défis imposés par le
changement climatique et les objectifs énoncés par les documents d’orientation internationaux. La
France doit dès aujourd’hui semer les graines d’une mobilité plus durable et équitable entre les
territoires.
C’est pour cette raison qu’un collectif d’associations appelle, sans attendre, à un renforcement et à un
développement de l’offre ferroviaire pour répondre à la demande de mobilité quotidienne et
régulière, à la fois dans les territoires des grandes métropoles et dans les territoires ruraux et périphériques.
Pour répondre aux objectifs internationaux et européens, la France doit investir massivement et stratégiquement dans les trains du quotidien, qui comprennent les relations métropolitaines, mais également les petites lignes aujourd’hui abandonnées.
L’épine dorsale de la mobilité quotidienne
Dans plusieurs pays européens, le train constitue l’épine dorsale de la mobilité quotidienne. C’est à
partir de cette épine dorsale que s’articule l’ensemble des autres modes de transport alternatifs à la
voiture. Le train offre de nombreux avantages en phase avec la nécessaire transition écologique.
Tout d’abord, le train limite considérablement la consommation énergétique, la pollution de l’air, les
nuisances sonores, tout en limitant les émissions de gaz à effet de serre (GES). Le train transporte en
France 9 % des marchandises et 11 % des passagers, pour seulement 0,3 % des GES.
Par son emprise limitée sur l’espace, le train permet de contenir l’artificialisation des terres, qui est
principalement due à la réalisation de nouvelles infrastructures routières et à l’étalement de l’habitat,
qui amène à choisir la voiture individuelle comme mode de transport dominant et structurant.
L’État investit plus sur la route que sur le rail
Le train contribue à l’amélioration de la santé publique sous le triple effet des baisses de la pollution,
des accidents de la circulation et de la sédentarité. Le train peut contribuer au retour des services
publics dans le monde rural et favoriser un aménagement du territoire plus équilibré grâce aux
30 000 km de voies déjà existantes.
Ces voies ferrées demandent à être améliorées pour développer un réseau dense et une desserte fine,
sur lesquels peuvent s’articuler les autres modes de transport et ainsi favoriser l’intermodalité. Face
aux défis sociaux de la transition énergétique, le développement du train permettrait de développer
l’emploi et contribuer à la réindustrialisation de la France.
Malgré ces avantages indéniables, durant les cinquante dernières années, les gouvernements
successifs ont choisi d’investir davantage dans les infrastructures routières que dans le ferroviaire,
pour le transport à la fois des personnes et des marchandises. Entre 1990 et 2015, l’État a investi 276 milliards (69 % de l’investissement dans le transport terrestre) dans la route et seulement 78 milliards (20 %) dans le rail (CGDD/SqeS/Rapport CCTN).
Pour une nouvelle stratégie de la mobilité
Par ailleurs, les petites lignes ont été largement négligées, en favorisant toujours plus le
développement des lignes à grande vitesse. Les conséquences de cette stratégie sur les usagers et les
territoires sont aujourd’hui particulièrement saillantes. Ce choix a entraîné la disparition de lignes de
proximité, la fermeture de gares et une augmentation du coût de la mobilité ferroviaire.
A cela s’ajoutent la dégradation des rames, les retards, les ralentissements et les annulations de train
sans solution de remplacement et sans information préalable. L’amélioration de la qualité de la desserte ferroviaire s’est par ailleurs déployée de manière inégale entre les territoires, entraînant ainsi d’importantes disparités entre d’un côté les principales agglomérations, qui bénéficient d’un système ferroviaire efficace, et les territoires périphériques, où l’offre est désormais limitée, voire inexistante.
Les habitants de ces territoires ont été ainsi contraints d’utiliser leur voiture pour tous leurs déplacements. Face à cette situation, il importe de façonner une nouvelle stratégie d’investissement et de développement de la mobilité pour atteindre les objectifs de report modal fixés par l’État dans le cadre de la Stratégie nationale bas carbone (SNBC).
Fixer des objectifs clairs de report modal
Il est urgent que tous les acteurs du rail français définissent et trouvent ensemble le financement
nécessaire à la remise en état du réseau existant et à son développement. Parallèlement, ils doivent
définir une structure de financement transparente qui lie chaque dépense et chaque investissement à
une offre de transport.
Cela afin de permettre à chaque acteur de prendre ses responsabilités : le commanditaire finance la
prestation demandée, la SNCF, ou un autre opérateur ferroviaire, est tenue d’offrir toutes les prestations stipulées dans le contrat, avec une qualité garantie, et les élus doivent porter le projet politique.
Il est aujourd’hui urgent d’agir, aussi bien face au réchauffement climatique qu’au niveau de l’avenir du rail français. Il est nécessaire de mettre en place un système qui fixe des objectifs clairs de report modal, qui déploie une stratégie pour les atteindre et qui garantisse les financements suffisants, tout en assurant la coconstruction entre tous les acteurs impliqués (opérateurs et gestionnaires d’infrastructures ferroviaires, État, région, usagers, associations).
Signataires : membres fondateurs du réseau #entrain, créé par l’Association MUST : Marc Gouttebroze, collectif des usagers des transports du Haut Allier ; Joël Hillaireau, « Sauvons les trains Nantes-La Rochelle-Bordeaux » ; Gilles Laurent, Union des voyageurs du Nord (UVN) ; Andréa von Maltitz, actif-trafiC ; Catherine Rainaudo, Roya Expansion Nature, ligne Nice-Tende-Turin ; Nicole Tagand, Etoile ferroviaire de Veynes ; Michel Vuillermoz, Nosterpaca, « Oui au train de nuit ». Et aussi Alexandra Pourroy, collectif Mobil’Hautes-Alpes ; Arnaud Schwartz, France Nature Environnement (FNE).