1. Les usagers souffrent et rencontrent des difficultés.
Depuis plusieurs mois, comme l’avait révélé le colloque de la FNAUT du 23 mai 2023, l’offre de transport ferroviaire est significativement insuffisante et inférieure à la demande d’environ 20 % sur tous les segments, qu’il s’agisse des trains de nuit, des TER avec des augmentations de la fréquentation de 30 à 40 % dans une bonne partie des régions françaises. Il en est de même dans les Intercités avec une demande qui explose (plus de 100 % sur les lignes desservant les littoraux) et les TGV qui voient s’accumuler les plaintes de voyageurs ne trouvant pas de places disponibles
Il en résulte une augmentation des prix pour tous, occasionnels comme abonnés. Au-delà de celle du début de l’année 2023 de 5,3 %, puis de celle de 2,6 % du début de l’année 2024, suivie par celle des plafonds des cartes avantages de 10 euros (voire de 30 euros sur certaines lignes), il ne faut pas oublier celle qui découle des règles du yield management avec des trains remplis de plus en plus tôt et de plus en plus souvent complets, au point d’imposer parfois la première classe, ce qui conduit souvent à un doublement des prix hors périodes creuses.
De plus ces augmentations s’expliquent par d’autres phénomènes : en situation de monopole, comme l’expliquent les économistes, toute entreprise maximise son bénéfice en rationnant l’offre. La SNCF avoue manquer de matériel, ce qui revient au même. Le ministère de l’économie, par ailleurs, demande à la SNCF de dégager plus de dividendes pour abonder, seule, le fond de concours au bénéfice de SNCF Réseau. À cette fin, la courbe d’augmentation du prix des sillons est confirmée, à l’inverse des souhaits formulés par tous les acteurs du secteur et de la mission lancée par le ministre, Monsieur Clément Beaune. SNCF Voyageurs choisit donc de répercuter dans le prix des billets les 8 % de hausse des péages. L’usager est donc substitué à l’État dans le financement de la régénération du réseau, à l’inverse de la pratique routière, hors autoroutes concédées.
Il en résulte aussi des tensions sociales favorisant l’émergence de revendications catégorielles (grève des contrôleurs) et les mécontentements des abonnés et navetteurs.
2. La politique des mobilités de l’État reste illisible à ce jour.
L’objectif d’un choc ferroviaire et d’un nouvel élan pour répondre au défi climatique s’affiche dans de nombreux discours et colloques, mais ne s’inscrit dans aucun engagement de programmation financière et de qualification de projets.
La promesse de 100 milliards d’investissements, sur une durée très variable de 10 à 17 ans, reste incertaine. 25 milliards sont à charge de l’État, prévus pour partie au contrat de performance de SNCF Réseau. Mais l’avenant à ce contrat, pour passer de 2,9 milliards par an à 4 milliards de travaux de régénération, n’est pas encore signé, ni négocié.
La contribution initiale d’un milliard de la SNCF est portée dès 2027 au double, à charge pour les usagers d’en supporter le prix sur leurs futurs billets.
L’équité entre les modes de transports, après les sommes colossales allouées pendant le Covid aux filières aéronautiques et automobiles (y compris la baisse des taxes sur l’essence et le gazole), est limitée aux dispositions modestes du budget 2024. Elle ne réduit en rien ni la gratuité de la route (hors autoroutes) ni la défiscalisation partielle de l’avion.
La nécessité d’une loi de programmation des investissements est réclamée et s’impose pour un secteur au « temps long ».
La loi SERM, qui suscite un réel engouement, les décisions de Monsieur Jean Castex sur les premières phases des LGV nouvelles, accroissant l’offre de sillons pour les transports du quotidien, les engagements divers sur les Intercités de jour et nuit, dont les retards répétés et nombreux, faute d’investissement alimentent la chronique, justifient un renfort des moyens de l’AFIT France et une programmation précise.
Le délaissé des lois successives sur le ferroviaire reste à corriger.
L’ouverture lente et progressive à la concurrence, la liberté tarifaire donnée aux régions ont pour conséquence non gérée une « fragmentation ferroviaire » qui devient pénalisante pour l’usager et un obstacle au report modal s’il n’y est pas remédié.
La multiplication non concertée des changements des conditions générales de vente, le nombre impressionnant de types de cartes de réductions nationales et régionales, les difficultés croissantes d’échange et de remboursement des titres de transport, l’absence de chambre de compensation associant opérateurs et autorités organisatrices en sont les signes les plus manifestes.
La FNAUT a montré que le « titre unique » voulu par le gouvernement ne pouvait aller sans modernisation ni concertation sur l’environnement de celui-ci. Il devient urgent d’y remédier.
3. Au total, la FNAUT souhaite une clarification des engagements de l’État dans son triple rôle :
- l’État actionnaire doit rester financeur de la régénération des infrastructures ;
- l’État aménageur des territoires doit s’inquiéter de l’inégalité de traitement de ceux-ci en maintenant le ferroviaire comme armature des mobilités vers les villes moyennes et les différentes régions ;
- l’État en charge du secteur public doit garantir une accessibilité au train quelle que soit la capacité contributive des ménages et permettre un dialogue social qui respecte les droits des usagers ;
La FNAUT souhaite que la conférence financière de juin prochain stabilise le modèle économique des transports urbains à l’instar des accords trouvés pour l’Ile-de-France. Elle souhaite un engagement réel et continu de l’État pour la régénération du réseau, un financement accru des modes de transport économes par ceux qui ne le sont pas et des moyens financiers suffisants pour le transport ferroviaire des régions.
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