JOURNÉE THÉMATIQUE DE L'ORT PACA du 02 décembre 2014
Ce mardi 2 décembre 2014, l'ORT PACA organisait, dans le superbe cadre du Centre des congrès du Pharo, une journée d'information sur "L'EVOLUTION DU SYSTEME FERROVIAIRE".
LE FERROVIAIRE, UN MARCHÉ OUVERT PROGRESSIVEMENT À LA CONCURRENCE
Ouvrant le colloque, Jean-Louis AMATO, Président de l'ORT, a rappellé quelques éléments du contexte avec une première évolution du fret ferroviaire en 2003 puis à partir de 2006 une concurrence effective. Côté Voyageurs, Thello devient, en 2009, le premier opérateur privé sur le territoire français.
Jean-Yves Petit, Vice Président du Conseil Régional, salue l'initiative sur le thème choisi dans une période cruciale, note avec satisfaction la présence de différentes structures SNCF mais aussi celles de RDT 13 et Thello.
Il exprime une approche de la réforme du point de vue d'une région, PACA. Les décrets publiés vont permettre la mise en place des missions sncf et d'objectifs de cohésion sociale au sein du groupe, Concernant les modalités de gouvernance, pouvons-nous espérer le retour de l'Etat stratége ?
Pour lui, les régions ne sont pas assez impliquées au regard des engagements financiers consentis. Ses préoccupations sont multiples, à propos de l'égalité des territoires pour laquelle des incertitudes planent, un déséquilibre est visible dans les propositions de l'Etat pour le futur Contrat de Plan Etat/Région. L'absence de visibilité des relations RFF/Opérateurs SNCF génère de la souffrance pour les collectivités. Dans la période, la Région subit sans concertation ni préavis des reports de travaux liées à des insuffisances en matière de ressources humaines. Il est impératif de rétablir une relation de confiance, la révolution culturelle n'est pas aboutie … il n'y a toujours pas de prise en considération des Collectivités Territoriales. Le dernier exemple en date est le report des travaux sur Cannes-Nice de deux ans sans que soient impliquées l'Autorité Organisatrice des Transports (AOT).
Une modification de la LOTI a été annoncée lors de la conférence environnementale, quel serait alors le rôle futur de l'Etat ? Actuellement, avec l'exemple de la « transversale Sud », Jean-Yves Petit constate un Etat en retrait.
Les AOT régionales ont des attentes en partie prise en considération avec la loi MAPAM, à suivre sur les transferts de compétences avec la loi NOTRe. Il revendique également une liberté tarifaire pour obtenir une meilleure tarification Quoiqu'il en soit, il restera le problème crucial de la dette : les péages grimpent en voyageurs et fret. C'est une conséquence du désengagement de l'Etat français. La part prise par l'Etat sur les investissements pour les infrastructures ferroviaires se situe à 90% en Grande Bretagne, plus de 60% en Allemagne et Suéde. Elle est de 32% en France.
Un maigre financement en faveur des AOT Région aurait pu être, dans le cadre du versement transport des entreprises, un versement intersticiel : voté à l'Assemblée Nationale cette possibilité a été retiré par le gouvernement ...
Jean-Yves Petit s'interroge à propos de la propriété du matériel roulant : à transférer aux Régions ? sachant que les 26 rames acquises par PACA représentent 260 millions d'euros sur le budget régional ! Une meilleure visibilité et la maîtrise des informations et des chiffres «redevance opérateur TER» est indispensable : 270 millions en 2014, ce n'est pas rien. Pour obtenir une meilleure qualité de l'offre tant réseau que matériel roulant, il faut que les régions soient mieux impliquées.
Les évolutions législatives peuvent permettre au foncier ferroviaire de bénéficier d'une gestion facilitée. Le patrimoine doit être géré intelligemment, en fonction des besoins. L'objectif devrait être d'assurer la valorisation du patrimoine et de bénéficier de présence humaine. Enfin, l'attribution des sillons, déjà compliquée, est un problème en devenir avec les nouveaux entrants voyageurs.
L'évolution du marché depuis l'ouverture à la concurrence du fret ferroviaire
Didier CLAUDE, de la direction fret SNCF Autochem, prospective et prestations d'appui. (Méditerranée/RA/Franche-Comté/Alsace) a rappellé les directives européennes de 1991 concernant la "libéralisation" ferroviaire qui allaient se traduire en 1997 par la partition entre le gestionnaire d'infrastructures RFF et l'opérateur historique, la SNCF.
Dans ce cadre, une dizaine d'opérateurs se sont positionnés pour environ 30% du marché. L'objectif affiché de redynamiser le fret par la concurrence n'a pas été atteint. Le constat est que les nouveaux entrants n'ont pas été chercher de nouveaux marchés en concurrence modale mais ont procédé à l'aspiration de trafics assurés par SNCF.
Didier CLAUDE rappelle un contexte économique difficile avec des flux de transports marchandises à la baisse et dans lequel le transport routier de fret reste le mode de référence. De plus des décisions comme les autorisations pour des convois routiers de 44 tonnes ont tét à l'opposé des objectifs affichés de facilitation du report modal de la route vers le fer. Aujourd'hui, le marché du fret ferroviaire est stable.
L'opérateur historique a pris en compte cette concurrence intramodale importante pour créer les outils adaptés. Le bilan comporte des aspects positifs :
1/ l'ouverture a permis aux chargeurs de mieux comprendre les responsabilités gestion infrastructures et qualité des services rendus par l'opérateur ;
2/ la mise en concurrence a été un moteur pour rénover les gammes de service. Les nouveaux entrants ont pris le trafic à SNCF, pas à la route. Ce constat a imposé une remise en cause de l'organisation de SNCF Fret.
Au plan national, la situation est stabilisée, il y a un déplacement de l'activité SNCF sur le marché international (Allemagne/Italie/Belgique) La réforme, tout en introduisant le concurrence impose aussi des jeux d'acteurs de coopération technique ou commerciale.
De son point de vue, les difficultés rencontrées à CLESUD traduisent une confusion entre le gestionnaire de l'infrastructure et les opérateurs.
Pierre SARACINO de la Régie Départementale des Transports des Bouches-du-Rhône RDT 13, Pôle ferroviaire, a exprimé la nécessité de complémentarité pour une progression du fret ferroviaire. Il interroge : la situation ne serait-elle pas encore pire sans concurrence ? L'enjeu est de trouver les façons de travailler ensemble pour de meilleurs résultats.
THELLO : un nouvel opérateur voyageurs en PACA en décembre 2014
Représentant l'opérateur Thello, Nicolas BARGELES, a rappellé la naissance de cette nouvelle entité en 2011 à l'initiative de Trenitalia/Transdev.
C'est une entreprise de taille assez réduite, 60 collaborateurs, qui souhaite investir un marché de niche, au départ celui des trains de nuit. L'opportunité ayant été consécutive au désengagement des opérateurs historiques, Thello positionne son offre vis à vis de prestations comme le service à bord, la restauration, ... mais aussi avec un tarif attractif sur les deux lignes exploitées à ce jour.
Nicolas BARGELES resitue l'état d'ouverture du marché vis à vis du 4ème paquet ferroviaire en cours d'élaboration par l'Union Européenne. Il décrit les entreprises entrant sur le marché voyageurs comme des petites unités, des spin-off d'Entreprises Ferroviaires historiques, positionnées à l'International. Pour elles, trouver de la capacité n'est pas facile pas plus que les accès aux dépôts, stationnements, .. Il y a également l'enjeu d'opérabilité ferroviaire, des correspondances et de l'accès aux autres trains. Il faut aussi se faire connaître du marché. Vu du voyageur, il peut s'agir de produit plus low cost ou plus haut de gamme.
Nicolas BARGELES précise les motivations de Thello sur le nouveau service mis en place en PACA. Marseille-Nice-Gênes est un maillon clé de l'arc méditerranéen et il y avait l'opportunité de re-créer une relation ferroviaire
Concernant le cabotage, Thello se considère comme très bridé. Son offre subit l'impact du contrat TER, il serait possible d'envisager de sauter des arrêts mais cette solution provoque une mauvaise insertion avec les autres trafics.
Pour Jean-Yves Petit, l'arrivée de Thello est une première, les problèmes et demandes du nouvel entrant sont à examiner de manière approfondie. Par exemple : quelle intervention financière de Thello pour l'usage d'installations cofinancées par l'AOT régional ? A propos de la tarification, il faut faire en sorte que les coopérations antérieures soient restaurées.
Gares et Connexions accueille les nouveaux transporteurs
Alain ANDRIEUX, Directeur des Gares Provence Alpes, assure l'exploitation des gares sur le domaine de gares et connexions. La gare est un point stratégique, non seulement des entreprises de transports ferroviaires mais aussi Métro, Bus, .. en lien avec des AOT. Reseau Ferré lui a délègué la gestion des quais . Tout ceci est réalisé sous le contrôle de l'ARAF.
Le gestionnaire des gares est contraint à une posture et des valeurs. SNCF doit gérer de manière transparence et prélever une redevance. Le modèle économique est régulé, avec des prestations de bases et un ensemble indivisible de services offerts :
Des évolutions sont à venir, de plus ou moins grande ampleur. La facturation est calculée sur la base des charges réelles auxquelles s'ajoutent une rémunération du capital investi. La redevance est payée pour chaque train.
La gouvernance est élargie pour les gares sur la base d'un document établi deux ans avant, visé par ARAF et SNCF. Il existe une instance régionale de concertation avce des membres de droit. Des possibilités de conventions pluriannuelles existent pour les gares nationales, le Conseil Régional dispose alors de plus de vision.
L'ARAF et l'Autorité de la concurrence incitent à la pédagogie et la transparence
Alain ANDRIEUX indique l'enjeu d'améliorer l'intermodalité en citant l'exemple de Marseille qui voit passer cahque jour un nombre plus grand d'usagers « métro » que « ferroviaire »
LA RÉFORME FERROVIAIRE
Une loi qui réunifie Réseau Ferré de France et le transporteur ferroviaire historique
SNCF Réseau, une nouvelle direction en PACA dès janvier 2015
Commentaires NOSTERPACA
Patience : Cette journée a permis de recueillir un nombre intéressant d'informations et de précisions, à la fois sur l'état des lieux et le système qui se met en place. Cependant, il faudra attendre pour constater une traduction concrète des bonnes intentions affichées. En attendant, le prochain Contrat de Plan Etat/Région en cours d'élaboration permettra-t-il de rattraper les retards accumulés en matière ferroviaire en PACA ?
Regret : A aucun moment n'est proposé un bilan économique de la déconstruction de l'outil ferroviaire français. Le milliard d'euros d'économie annuelle lié à la "réunification" du mode de gestion de l'infrastructure avait été annoncé dès les prémices de réforme par le dirigeant de SNCF. Et pour le reste, qu'en savons-nous ? Rien mais "SNCF mobilités" va renforcer son fonctionnement cloisonné par activités au détriment de la productivité de l'outil. Nous avons pourtant entendu que pour permettre aux nouveaux opérateurs de bien travailler, il faut tisser des coopérations ... Où est la cohérence ?
Mémoire : Dans les pays européens, à la naissance du système, les compagnies ferroviaires privées avaient opté pour un fonctionnement intégrant infrastructures et exploitation. Il ne s'agissait pas d'un positionnement idéologique mais de pragmatisme : l'entreprise intégrée est gage d'efficacité économique.
(récit Gilles MARCEL/photos Gilbert SOULET)
RAPPEL : France Nature Environnement (FNE PACA) et NOSTERPACA avaient organisé une journée d'échanges sur le cadre législatif du mode ferroviaire le jeudi 16 octobre 2014. Pour prendre connaissance de l'article relatant cette initiative :
A l'occasion de cette journée, Raymond LANG, Docteur ès sciences économiques, Membre du directoire « Transports et Mobilité durable » est intervenu pour décrire "Le processus de libéralisation des chemins de fer européens et la réforme ferroviaire française"
La présentation en format PDF est disponible i-après :